Parvis de la cathédrale de Valence (suite) : vers une archéologie du siècle dernier ?

Plus d’un mois après une demande d’entrevue au ministère de la culture pour évoquer l’inexplicable absence d’archéologie préventive sur le chantier du parvis de la cathédrale de Valence, une délégation intersyndicale FSU et SUD Culture a finalement rencontré le 30 octobre la sous-direction de l’archéologie et la sous-direction des Monuments Historique, avec un représentant de la DGPA.

Pour rappel, le ministère de la Culture, en l’occurrence la DRAC Auvergne-Rhône-Alpes, est maître d’ouvrage d’un important chantier mené sur le parvis de la cathédrale de Valence, et son directeur régional avait décidé que ce chantier se ferait sans opération préalable d’archéologie préventive alors que les travaux se situe à un endroit connu comme riche du point de vue archéologique et majeur pour l’histoire et le patrimoine (ville romaine, rempart, baptistère paléochrétien, église, palais épiscopal…).

Depuis nos alertes, depuis la dizaine d’articles dans la presse qui ont relayé l’incompréhension et la colère des archéologues, des associations locales et de nombreux citoyens, la DRAC n’a pas dévié de sa ligne de défense : « les travaux projetés ne nécessitent pas de mettre en œuvre un chantier archéologique car les vestiges ne seront pas touchés »…

Les travaux ont finalement commencé sur place le 28 octobre. Sous la surveillance d’un archéologue missionné par la DRAC (ah tiens.. il y aurait un risque ?)

Lors de l’entrevue de jeudi, nous avons pu expliquer aux responsables des services MH et archéologie du ministère :
Primo qu’il s’agissait d’un site d’intérêt exceptionnel, et que les vestiges étaient immédiatement affleurants sous l’enrobée de la place et que tous travaux qui y seraient menés endommageraient irrémédiablement des éléments des archives du sol.
Secundo que la mise en œuvre de cette opération apparaît indiscutablement comme baroque et mal ficelée :

  • un seul archéologue pour surveiller des travaux de terrassement menés sur un site archéologique n’est ni suffisant ni acceptable !
  • alors que la première tranche des travaux prévoit de descendre à cinq mètres de profondeur dans un secteur supposé sans vestige archéologique -d’après l’étude préalable MH qui se fie aux observations du XIXe sicèle – ces travaux sont menés avec une pelle mécanique inappropriée (mini-pelle 8T) qui nécessitera des paliers et une rampe d’accès, aménagements qui seront localisés à l’emplacement des vestiges avérés !
  • alors que l’opération fait l’objet d’une instruction d’autorisation de travaux sur MH, ce qui constitue un fait générateur d’archéologie préventive tel que défini dans le code du Patrimoine, la DRAC a mis en place une simple « surveillance de travaux » ce qui, à notre connaissance, n’existe pas dans la réglementation, à moins de faire référence aux usages d’avant la loi de 2001 sur l’archéologie préventive !

Enfin, le ministère de la culture, et ses services déconcentrés, sont chargés de faire appliquer le code du Patrimoine que ce soit sur des projets d’aménageurs privés, de collectivités locales… et sur ses propres projets ! De tels agissements fragilisent donc le dispositif d’archéologie préventive. Comment exiger demain des aménageurs de prendre en charge tout ou partie du coût des fouilles préventives si l’État montre le mauvais exemple en s’affranchissant de ses propres obligations ???

Les sous-directeurs de l’Archéologie et des Monuments Historiques ont répondu :
1/ qu’ils n’étaient pas en capacité de répondre sur les éléments techniques du dossier (ils n’ont eu qu’un mois et demi pour les avoir…) ;
2/ qu’il ne voyait pas le problème réglementaire à ce mode opératoire dans l’attente d’une éventuelle opération d’archéologie préventive (à quand une fouille programmée lancée par un SRA à l’emplacement d’une future fouille préventive pour en réduire le coût ?) ;
3/ que le chantier qui a démarré n’est qu’une première tranche de travaux à l’emplacement d’un secteur considéré comme peu sensible (et sans se donner les moyens de vérifier si c’est le cas) ;
Pour les autres tranches de travaux du parvis, en particulier les réaménagements et les reprises des réseaux, devraient faire l’objet d’une instruction au titre de l’archéologie préventive.

Nous attendons donc que l’intersyndicale des archéologues d’Auvergne-Rhône-Alpes ait enfin une réponse à la demande de rendez-vous envoyée à la DRAC, afin d’obtenir des réponses plus précises.

D’ici là les archéologues, les associations, les chercheurs, resteront mobilisés pour empêcher un nouveau désastre.

FSU Culture & SUD Culture Solidaires,
31 octobre 2025

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