Ce 8 mars revêt un caractère particulier. Le contexte pandémique avec son cortège de confinements a été particulièrement révélateur et amplificateur des inégalités sociales et économiques que subissent quotidiennement les femmes, que ce soit dans la sphère publique comme privée.
La cause de ces violences et inégalités est connue : le système patriarcal. Il faut s’y attaquer partout, toute l’année : dès l’école maternelle, dans la rue, dans les médias, dans les entreprises, au travail comme dans toutes les organisations collectives, et bien sûr dans la Culture. C’est ce système qui « autorise et tolère » socialement les conduites de dominations et de violences envers les femmes.
Les femmes en première ligne dans les professions mal payées et peu reconnues
La pandémie du Covid 19, et notamment le premier confinement, ont mis en lumière le rôle primordial des travailleurs·ses essentiel·les au bon fonctionnement de notre société ; celles et ceux qui soignent, nourrissent, nettoient, ramassent les poubelles, livrent les marchandises vitales, etc. Ces professions, dévalorisées au regard des diplômes, de la pénibilité, et de l’utilité sociale du travail effectué, sont pour beaucoup exercées par des salarié·es issu·es de l’immigration. Parmi ces travailleurs·ses, les femmes sont nombreuses et cantonnées dans les métiers dits du « care » (du soin, de l’aide à la personnes), du nettoyage… dans des activités considérées comme « naturelles » pour les femmes. Ces métiers sont peu couverts par les conventions collectives, ont des classifications et des grilles salariales plus basses, sont moins bien rémunérés et ont de mauvaises conditions de travail.
Les femmes subissent particulièrement la précarité de ces emplois : CDD, temps partiel, absence de reconnaissance. L’écart de rémunération entre les femmes et les hommes est toujours de 25 % sans se réduire réellement, c’est comme si un quart de la journée de travail d’une femme ne lui était pas payé. Le passage à la retraite creuse les inégalités de revenus, les femmes touchant une pension de 40% plus faible.
Alors que l’on a applaudi les soignantes, les caissières, et toutes celles qui faisaient partie de la « première ligne », pour reprendre le vocabulaire va-t’en guerre du président, alors que le gouvernement et la majorité ont fait de belles promesses, les entreprises ont continué de distribuer d’énormes dividendes aux actionnaires sans la moindre considération pour les salarié·es. Ainsi, les travailleuses de la santé, du social, de l’éducation, du commerce n’ont droit qu’à des miettes : dans le meilleur des cas, une prime humiliante (de 500 à 1500 euros), ou encore une augmentation de salaire ridicule accordées à certaines soignantes.
Le bonheur de la triple journée de travail pour les femmes
Le télétravail a été une solution d’urgence pour maintenir « l’activité économique » depuis le début de la pandémie. Il s’est mis en place de manière chaotique, au ministère de la Culture comme ailleurs, les salarié·es ayant dû travailler avec leur matériel informatique personnel, dans des espaces peu ou pas adaptés. Une enquête de l’Ined montre que 42 % des femmes travaillant à distance l’ont fait dans une pièce partagée, contre 26 % des hommes. Difficile de décloisonner activité professionnelle et travail domestique. Télétravail et confinements ont donc contraint les femmes à cumuler, sur un même lieu et en même temps ces deux activités qui se sont accrues (garde d’enfant, soin aux personnes, repas supplémentaire le midi…). Sans oublier l’école à la maison, lors du premier confinement ou en cas de fermeture de classes ou d’établissement scolaire. Dans une enquête de l’Insee, 45 % des femmes interrogées ont dit passer 4 heures supplémentaires par jour à s’occuper des leurs enfants, tout en télétravaillant (contre 26 % des hommes).
En matière de répartition du travail domestique, les femmes sont les grandes perdantes puissent qu’elles consacrent en moyenne 3h26 aux tâches domestiques (ménage, courses, soins aux enfants, etc.) contre 2h pour les hommes selon l’Insee. Depuis 1985, l’écart de temps consacré au travail domestique entre les
femmes et les hommes à diminué d’une heure… parce que les femmes ont réduit de 69 minutes le temps qu’elles y consacrent. Les femmes s’acquittent de 72 % des tâches ménagères et 65 % des tâches parentales. Ces inégalités ont des incidences sur leur vie professionnelle, notamment en raison du recours au temps partiel pour s’occuper principalement des enfants.
Nous aurions pu espérer que le confinement conduirait à un rééquilibrage du partage du travail domestique entre hommes et femmes puisque les deux étaient présent·es à la maison. Les témoignages et les enquêtes montrent que priorité a été donnée au travail de Monsieur. Il semble encore loin le monde d’après et pour l’instant, il ressemble encore beaucoup trop à celui d’avant.
Le premier confinement passé, le ministère n’a plus accordé d’ASA pour gérer les enfants dès lors que le télétravail était possible. Cette situation ne semble pas émouvoir outre mesure le secrétariat général du ministère alors que les ministres successifs s’auto congratulent de leur prétendue politique d’égalité entre les femmes et les hommes. La honte ne semble pas avoir changé de camp.
Les femmes encore et toujours victimes de violences
Comme redouté, les périodes de confinement ont exacerbé les violences intra-familiales : + 30% pour les violences faites aux femmes. Les plus cyniques mettront en avant que le nombre de féminicides a diminué en 2020. Un aspect positif du confinement ? Malheureusement non, les meurtres de femmes par leur conjoint ou ex-conjoint ont majoritairement lieu lorsque les femmes essayent de quitter le domicile conjugal ou après qu’elles aient réussi à le faire. Difficile de fuir en étant confinée avec son bourreau.
Le gouvernement a beaucoup communiqué, le ministère de la Culture aussi mais, depuis la signature du protocole de 2018 sur l’égalité hommes-femmes, les moyens de suivent pas. La libération de la parole des femmes victimes de violences sexistes et sexuelles est mise en avant mais encore faut-il que cette parole soit écoutée, qu’elle ne soit pas remise en cause, qu’elle soit crue et que des procédures soient mises en place pour condamner les agresseurs. Et au ministère, alors que la plate-forme AlloSexisme se révèle peu adaptée d’après les retours de plusieurs victimes, les cas de violences sexistes et sexuelles au travail signalés sont en forte augmentation. Dans les écoles relevant du ministère, la situation des étudiantes est intolérable.
Comment faire confiance à un ministère qui reste étrangement muet sur les agresseurs présumés, au nom de la présomption d’innocence, qui banalise des communications sexistes se retranchant derrière le caractère prétendument artistique ou historique de telle photo d’illustration. Au ministère, dans le monde de la musique, du cinéma, du spectacle vivant des voix s’élèvent pourtant avec force pour témoigner de violences subies, pour dénoncer la culture du viol, l’impunité des agresseurs… ? La honte doit changer de camp et, pour être crédible, le ministère doit prendre ses responsabilités !
Cette année encore SUD Culture appelle à participer aux différentes actions et manifestations qui se dérouleront le 8 mars partout en France (un préavis de grève intersyndical couvre les agent·es de la fonction publique).
Parce que cette journée de lutte permet de faire entendre les voix des femmes ;
Parce que cette journée est une caisse de résonance des luttes menées toutes l’année pour les droits des femmes ;
Parce que cette journée est internationale et quelle témoigne de la solidarité des femmes entre elles ;
Parce que tant qu’il faudra lutter contre le patriarcat, nous lutterons !
Le tract en pdf est ici