Avis de démantèlement du ministère de la Culture ou le grand jeu de « mécano administratif » du Plan de transformation ministérielle

Il aura fallu presque 2 ans, après l’annonce fracassante et ô combien originale d’un nouveau plan de modernisation, le bien-nommé « Action publique 2022 », pour que le gouvernement et le ministère passent à l’action.

Avec pas moins de deux circulaires publiées début juin, le premier ministre a donné ses consignes. Pour les administrations centrales, le message est clair : chasse aux doublons, suppressions et regroupements d’organismes n’atteignant pas 100 ETP, délocalisations de certaines missions en région et bien sûr baisse des effectifs, seule donnée où l’être humain est pris en compte.

Après avoir donné la primeur de ses annonces à un parterre de cadres supérieurs lors du fameux séminaire de l’encadrement supérieur, Frank Riester a dévoilé son plan pour le ministère lors du comité technique ministériel du 17 juin 2019. Un Plan de Transformation Ministérielle (dites PTM) concocté en chambre par un cabinet hors sol, au mépris des missions et des agent-e-s.

Au niveau des éléments de langage, rien de nouveau, on recycle les vieux discours : une administration centrale recentrée sur la conception, le pilotage et l’évaluation des politiques publiques, une administration centrale plus efficace et, parce qu’il faut bien rattraper 20 ans de retard, un grand projet de numérisation des procédures.

Parmi ces annonces, il y en a des précises, il y en a des plus floues.

Au chapitre des décisions presque définitives, il y a la centralisation au secrétariat général des fonctions dites supports de la logistique, de la communication, de la formation et de la documentation. Soit le regroupement de tous les agent-e-s actuellement dans les directions métiers (DGCA, DGP et DGMIC) au secrétariat général.

L’objectif est très clair : mutualiser pour mieux supprimer des postes. Quitte à priver les directions métiers de ressources essentielles au fonctionnement de leurs services.

ET le plus inquiétant concerne la méthode de l’administration. En effet, celle-ci a déjà été éprouvée pour la réorganisation des services logistiques qui est presque finalisée : les agent-e-s sont rattachés hiérarchiquement à leur nouveau service sans être informés de l’évolution de leur situation professionnelle et sans même qu’un plan de réorganisation soit réfléchi et soumis pour avis aux instances de dialogue social (le comité technique et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) et ce, en violation directe des règlements. Et l’organisation de la logistique dans le projet Camus ? On verra plus tard nous dit l’administration…

Parce que le Secrétariat général doit devenir un super SG, il sera désormais doté « d’une véritable direction des ressources humaines et d’une direction administrative et financière ». Tout va changer alors… Oui, enfin, on ne change pas comme ça les bonnes vieilles habitudes. Pour la DRH, il s’agira surtout de servir l’encadrement sup avec une nouvelle sous-direction chargée de la stratégie RH qui impose aux agent-e-s du SRH concernés une remise en cause de leurs métiers et de leurs missions et qui, de façon plus large, menace la cohérence de la gestion des personnels du ministère.

Parmi les projets plus flous, il y a l’annonce de la création de 3 équipes transversales pour la transformation numérique de l’administration et les systèmes d’information, la fonction d’études, de prospective et d’évaluation et l’action européenne et internationale. Ces équipes doivent être regroupées au SG début 2020. Nous pourrions tenter une exégèse de ces vocables technocratiques pour mieux cerner les intentions du cabinet ; mais derrière les mots, il y a surtout des projets vagues, sans connaissance réelle des missions effectuées par les agent-e-s et les services et qui, au nom de la simplification, démantèlent des pans entiers des politiques publiques du ministère.

Car non, les bureaux en charge de l’action européenne et internationale dans les DG métiers ne sont pas seulement au service des instituts et des alliances françaises mais effectuent des missions essentielles pour accompagner la diffusion internationale des acteurs culturels français. Non, les inspections métiers de la création artistique et du patrimoine n’effectuent pas des missions redondantes avec l’IGAC mais exercent des missions d’expertise, d’évaluation, de contrôle et de conseil au service des politiques culturelles. Concrètement, comment vont se constituer ces nouvelles entités ? Mystère, attendons la note sur la méthode promise par le ministre pour en savoir plus.

Enfin, et c’est le grand projet, le ministre Frank Riester souhaite la création d’une nouvelle direction ou délégation chargée du pilotage des politiques de transmission et d’accès à la culture, de la coordination des politiques territoriales et de la coordination des politiques de l’enseignement supérieur culture et de la recherche.

Avec quels moyens, avec quels effectifs, et pour porter quels projets ? Y aura-t-il fusion des services actuellement présents dans les DG métiers au sein de cette nouvelle direction/délégation, quels seront ses moyens d’action en terme de budget et de gestion de ses emplois ? Tout cela reste très nébuleux et plutôt mal pensé et surtout très improvisé !

Nous ne voulons pas de ce Plan de Transformation Ministérielle qui détruit
nos métiers, nos missions, les agent-e-s et qui prépare l’étape d’après :
un ministère balkanisé et vendu à la découpe au plus offrant.

Comme le dit notre cher ministre, la clef de la réussite repose
sur la mobilisation des agent-e-s.
Prenons-le au mot, mobilisons-nous !