Dans le cadre de la présentation du budget 2025 du ministère de la Culture, Rachida Dati s’est targuée de présenter un budget constant pour son ministère. Devant la commission des affaires culturelles du Sénat, la ministre de la Culture a réaffirmé que « pas un euro pour la culture ne manquerait pour les territoires ».
Le secteur culturel, en moyenne 4 fois plus soutenu par les collectivités territoriales que par l’État, semble pourtant exposé à des baisses de financement drastiques. D’ores et déjà dénoncée par les associations nationales de collectivités territoriales, la demande d’économie de l’ordre de 8,5 milliards d’euros, bien au-delà des 5 milliards initialement annoncés, adressée aux collectivités territoriales dans le cadre de la loi de finances 2025 menace la capacité à pouvoir maintenir les services et équipements publics, en particulier parmi les 450 plus grandes collectivités qui seraient mises à contribution.
Hormis la méthode des coupes, par définition brutale, elle est surtout injustifiable : la part de la dette locale des collectivités reste stable depuis 20 ans, aux environs de 9 % du PIB, quand celle de l’Etat a explosé.
Depuis plusieurs années déjà, nous tirons la sonnette d’alarme. Les financements publics ne suivent plus. Dans ce contexte inquiétant pour nos professions, le gouvernement a fait le choix incompréhensible de couper en 2024 près de 10% du budget alloué au soutien à la création artistique par le ministère de la Culture (-96 millions d’euros !), alors même que les collectivités territoriales sont mises en difficultés pour maintenir leurs financements.
Si l’année 2024 révèle déjà de nombreuses difficultés sur le territoire, avec moins d’activité ou des politiques salariales revues à la baisse, l’année 2025 s’annonce catastrophique. Le ministère de la Culture ne cache pas que des milliers de spectacles ne verront pas le jour et qu’un effondrement des coproductions est à prévoir. Dans ce contexte, une équipe artistique sur deux, risque de disparaître. Ce sera moins de créations, donc moins de levers de rideaux, donc moins d’embauches de salarié·es permanent·es et d’intermittent·es, et le risque d’un effondrement d’un écosystème.
Après deux ans de lutte, Jamila vient de remporter une victoire au pénal importante. Le tribunal reconnaît la discrimination en raison d’une grossesse et condamne les deux dirigeants du Studio théâtre de Stains à 12 mois avec sursis. Cela fait suite à une première victoire aux prud’hommes. Alors que seule 3% des plaintes pour discrimination aboutissent, nous nous réjouissons de cette victoire pour Jamila et toutes les femmes !
La directrice artistique, Majorie Nakache, et le directeur du théâtre de Stains, Kamel Ouarti, ont été condamnés à 12 mois de prison avec sursis pour discrimination en l’état de grossesse d’une ancienne comédienne. Les peines sont lourdes à la mesure du calvaire qu’a vécu Jamila. A l’annonce de sa grossesse, Jamila avait en effet été écartée de toute les pièces y compris celles déjà programmées pour être finalement licenciée. Pour rappel, le théâtre avait été condamné en mai dernier par le tribunal des prudhommes pour discrimination fondée sur sa grossesse et harcèlement moral.
Le jugement rendu vendredi est donc une seconde victoire écrasante pour Jamila face ces anciens employeurs qui n’ont eu de cesse de nier tout fait de discrimination. Les deux directeurs ont également l’obligation d’afficher le verdict dans les locaux. Nous nous désolons par contre que les faits de harcèlement moral n’aient pas été retenus comme par la juridiction prud’hommale, les juges estimant que la discrimination inclue le harcèlement de fait. Si les juges ont été au-delà de la réquisition du procureur de 6 mois de prison avec sursis pour Marjorie Nakache, la mettant ainsi à la même hauteur de responsabilité que Kamel Ouarti, nous déplorons également que l’interdiction requise de gérer des ressources humaines durant deux ans pour ce dernier n’ait pas été retenue.
Le vendredi 2 juin, s’est tenue l’audience du procès au pénal de Jamila A. contre le directeur administratif et la directrice artistique du Studio théâtre de Stains. Ce procès intervenait après le procès aux prud’hommes, remporté en départage par Jamila A., et donc une première reconnaissance des faits de discrimination pour grossesse et de harcèlement moral. Il est le résultat de la saisine et de l’enquête faite par l’inspection du travail. Dans les deux procédures, Sud Culture Solidaires s’est porté partie civile en soutien de la plainte de Jamila A.
Au bout de 6 heures d’audience, les réquisitions sont lourdes pour les deux prévenu-es. Le procureur a requis :
· Une peine d’un an d’emprisonnement avec sursis pour le directeur administratif du théâtre, assortie de l’interdiction de travailler en lien avec la gestion de ressources humaines, · Une peine de 6 mois avec sursis pour la directrice artistique du théâtre, · L’affichage de la condamnation durant deux mois dans les locaux du théâtre.
Il s’agit là d’une lourde réquisition, assez rare, qui mérite donc d’être soulignée, indépendamment du délibéré final de la Cour renvoyé au 22 septembre.
Reconnaissance de la discrimination pour grossesse et du harcèlement moral
Après plus de deux ans de combat, Jamila A. a remporté son prud’homme contre le Studio théâtre de Stains. A l’été 2020, Jamila A. – qui travaillait à la fois à l’administration du théâtre et sur scène – avait été écartée de toutes les pièces où elle était prévue, alors qu’elle était enceinte. Les prud’hommes ont reconnu une discrimination fondée sur sa grossesse mais aussi un harcèlement moral contre elle au sein de la structure. Enfin il a été reconnu que l’employeur n’avait pas répondu à son obligation de sécurité vis-à-vis de sa salariée. Ces éléments ont amené à reconnaître comme nul le licenciement pour inaptitude prononcé en septembre 2021. Nous saluons une nouvelle fois la ténacité et le courage de Jamila, face aux dénigrements répétés à son encontre de l’administration du théâtre.
Par-delà la victoire de Jamila, ce procès apporte plusieurs enseignements dans le cadre de la lutte contre les violences sexistes que constituent le harcèlement moral et la discrimination pour fait de grossesse. Tout d’abord nous nous félicitons que l’intervention volontaire de Sud Culture ait bien été reconnue comme recevable, ce qui entérine le fait que la situation de Jamila A. est une situation qui concerne tout le milieu de la culture. La direction du théâtre a nié pendant les prud’hommes le caractère de salariat des artistes. Dans le monde des arts comme ailleurs, les travailleurs et les travailleuses sont soumis à une subordination, et à ce titre, ils et elles doivent être protégés par le droit du travail et doivent pouvoir se syndiquer librement.
Le point crucial de ce procès porte sur le débat de l’usage des enregistrements audio aux prud’hommes, où ils demeurent non reconnus, contrairement au pénal. Lors du procès, l’avocate a pu produire dans les pièces un PV de l’inspection du travail, auquel Jamila avait fourni des enregistrements audios qui témoignaient de l’agressivité et de la violence de la direction envers elle. Ce PV rendant compte des enregistrements a apporté des éléments concrets et précis, que la direction du théâtre a eu bien du mal à expliquer. La reconnaissance de la pièce comme valable est une avancée importante pour tous les salarié-e-s, le harcèlement moral restant trop souvent renvoyé à une parole contre parole.
Le combat n’est cependant pas terminé, la gravité des faits a amené l’inspection du travail à saisir le procureur, ce qui a donné lieu à une enquête de police débouchant sur une procédure pénale. Nous donnons désormais rendez-vous au pénal le vendredi 2 juin 13h au Tribunal de Bobigny pour continuer à soutenir Jamila et poursuivre la lutte contre les violences sexistes dans le monde des arts et de la culture.
Depuis la réouverture des salles, la reprise escomptée des activités du spectacle vivant et du cinéma n’a pas eu lieu. Pire, la déclaration du Premier Ministre Jean Castex, le 6 décembre dernier, selon laquelle « jusqu’aux fêtes de fin d’année, on lève le pied, on arrête, on se protège et on protège ainsi notre capacité à profiter de Noël », a accentué la vague d’annulations et de reports de nombreux événements culturels.
La crise est violente depuis bientôt deux ans. Elle n’est pas terminée au 1er janvier 2022. Comme nous le disons collectivement depuis des mois, son impact va se faire ressentir durant de nombreuses années.
Le public n’est pas revenu dans les salles. C’est le triste constat que dressait une étude publiée dans Le Monde le 16 octobre dernier, qui indiquait que “39 % des Français n’ont pas remis les pieds dans un lieu culturel depuis l’instauration du passe sanitaire”.
Le secteur dit du « spectacle occasionnel » et des arts de la rue voient s’aggraver une situation déjà catastrophique : un niveau d’emploi à 20% pendant les six premiers mois de 2021, une reprise partielle à l’été aussitôt entravée par des annulations en août suite à la mise en place du passe sanitaire – bien souvent impossible pour des événements en extérieur, dans les rues des communes-, une cascade d’annulations en décembre, dans les comités des fêtes, les CSE (ex-comités d’entreprises), les feux d’artifice, les rendez-vous festifs de fin d’année en espace public et autres spectacles de Noël, … Des musiciennes et musiciens ont par exemple vu supprimer tous leurs concerts de décembre comme de janvier. Rappelons que ce secteur, bien que dit « occasionnel » représente un emploi sur dix dans le spectacle, et que pour les artistes et technicien·ne·s concerné·e·s il s’agit de leur activité principale.
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