Depuis le début du mouvement des gilets jaunes qui s’est répandu comme une traînée de poudre en France depuis mi-novembre, rarement la répression policière d’un mouvement social aura atteint un tel degré de violence. On ne compte plus les visages défigurés et les yeux crevés par des tirs de flash balls, celles et ceux qui auront perdu à jamais l’audition suite à des tirs de grenades assourdissantes, les militant-es traîné-es au sol et roué-es de coups par les CRS, les interpellations et les mises en garde à vue arbitraires de manifestant-es pacifiques ni le nombre de comparutions directes.
Dans ce climat de grave dérive anti-démocratique, le paroxysme de l’insupportable restera sûrement pour longtemps le parcage de ces 151 jeunes collégiens et collégiennes de Mantes-la-Jolie genoux à terre, mains sur la tête, certain-es d’entre eux menotté-es contre un mur et tenu-es en respect par les forces de l’ordre.
Ces comportements, plus dignes d’un régime totalitaire que d’une démocratie, suscitent l’indignation et de vives réactions bien au-delà de nos frontières. Plusieurs avocat-es ont déjà dénoncé de très graves manquements à la loi.
Nous les dénonçons aussi. Tout comme nous dénonçons les 1300 interpellations et gardes à vue préventives effectuées le 8 Décembre 2018 par les forces de l’ordre avant même que n’ait débuté la 4ème journée de mobilisation nationale des gilets jaunes.
Aujourd’hui, les oligarques de la République, totalement déconnectés des réalités des milieux populaires et des plus précaires, ont peur de la jeunesse. Ils ont peur d’un mouvement social auquel ils ne comprennent rien. Voilà pourquoi la première réponse qu’ils trouvent à apporter aux revendications sociales, c’est l’intimidation policière et la répression.
Ainsi, le 24 Novembre dernier, pas moins de 280 000 euros de gaz lacrymogènes ont aspergé les manifestants, rien qu’à Paris ! Le 8 décembre 2018, c’est plus de 89 000 policiers, CRS et autres membres des forces de l’ordre qui ont encadré les manifestations qui se sont déroulées partout en France.
À la veille de la 4ème journée nationale d’action des gilets jaunes certains membres du gouvernement (Christophe Castaner, Benjamin Griveaux etc…) ont même proposé de rétablir l’état d’urgence. A quoi certains spécialistes du droit ont répondu que c’était inutile.
En effet, le durcissement des lois sécuritaires est tel depuis les attentats 13 Novembre de 2015 à Paris, que nous vivons de fait aujourd’hui en France dans un état d’urgence permanent ! Sous couvert de lutte contre le terrorisme, ce sont en fait tous les mouvements sociaux qui sont aujourd’hui sous surveillance policière permanente.
Cette répression est dans la continuité de celle menée depuis plusieurs années contre les manifestations syndicales, en particulier depuis le printemps 2016, contre les grèves, contre les luttes écologistes et les ZAD. Elle est aussi dans la continuité de celle que subisse au quotidien les habitant-es des quartiers populaires.
Il faut se rappeler qu’en Grèce en 2008 déjà, les forces de l’ordre réprimaient férocement les manifestations contre la grave crise économique main dans la main avec les militants d’extrême droite d’Aube Dorée. C’est cette même répression policière qui a conduit à la mort d’Alexis Grigoropoulos, jeune lycéen grec de 15 ans assassiné il y a exactement 10 ans par un policier dans le quartier d’Exarcheia à Athènes, en pleine manifestation. De la même façon, la répression policière violente des manifestations de lycéen-nes et d’étudiant-es a conduit à l’assassinat de Malik Oussekine par la police à Paris en décembre 1986.
Ne laissons pas les jeunes et plus généralement les manifestant-es livré-es à la violence arbitraire de la police. Nous appelons à défendre le droit de manifester, le droit de faire grève, le droit de se réunir et de s’organiser collectivement. Nous appelons à participer aux différentes initiatives de protestations contre ces violences policières et en soutien aux personnes qui en sont victimes.
Surtout, rejoignons et renforçons la mobilisation sociale actuelle, dans les entreprises, dans les établissements publics, dans la rue, sur les ronds-points, avec les gilets jaunes et les lycéen-nes, pour exiger la mise en œuvre des revendications sociales, écologiques et économiques nécessaires pour garantir plus d’égalité et de justice sociale, une vie digne, des services publics de qualité, une transition écologique.
Avignon, le 9 décembre 2018