Harcèlement sexuel au musée du quai Branly : stop à l’impunité !

Depuis la rentrée 2021, une lauréate de la bourse de recherche doctorale du Musée du Quai Branly est harcelée moralement et sexuellement par un chercheur invité. Prenant le prétexte d’avoir besoin de cours de français pour l’isoler ; il se comporte de façon de plus en plus inconvenante avec elle. Il lui dit qu’il veut la « mordre » et mime le geste quand il la voit, lui fait comprendre qu’il veut la mettre enceinte. L’attitude instable de cette figure hiérarchique à chaque fois qu’elle s’oppose, inquiète l’étudiante. Face à son refus explicite de passer des moments plus « privés » avec lui, il essaie de la faire chanter affectivement. Un soir de novembre 2021, il passe à l’acte, et tente de la forcer à avoir une relation sexuelle avec lui. La doctorante ne répondant plus à ses salves de messages, il joue de son statut pour tenter de l’approcher physiquement à son insu. En décembre, il finit par forcer la porte à code de son immeuble pour déposer dans sa boîte aux lettres un courrier dans une enveloppe officielle du musée où il lui réitère ses avances.

Face à cette surenchère, la doctorante fait un premier signalement aux ressources humaines en décembre 2021. Aucune enquête administrative n’est alors engagée par le Musée du Quai Branly, l’agresseur étant seulement sommé de ne plus entrer de nouveau en contact avec sa victime. 

Nullement découragé, le harceleur continue à faire pression pendant les vacances de Noël, en envoyant des messages sur le groupe WhatsApp des doctorant·es et postdoctorant·es dont fait partie l’étudiante. Elle signale le 14 janvier le non-respect de l’interdiction qui lui avait été faite d’entrer en contact avec elle. Aucune suite n’est donnée par l’administration. Regards menaçants, présence insistante…, aidé d’autres agent·es, dont certain·es qui ont par ailleurs menacé la victime, l’agresseur peut maintenir et intensifier la pression sur les étudiantes. En juin dernier, il entre dans le bureau de la doctorante pour menacer une de ses camarades proches. 



Un second signalement est fait le 2 juin 2022, la direction des ressources humaines du Musée du Quai Branly se décide, enfin, à diligenter une enquête administrative. Le chercheur invité est suspendu à titre conservatoire. Or, pendant le temps de cette enquête, les 13 doctorant·es et post doctorant·es qui avaient témoigné en faveur de la victime et écrit une lettre ouverte au président et à la direction du musée pour la soutenir, subissent des pressions et le mépris de la directrice des ressources humaines. En effet, contrairement à ces jeunes chercheur·ses présent·es le temps d’une année, le chercheur mis en cause fait partie d’un projet sur le long terme. Ce projet aurait-il plus de valeur aux yeux de la direction que la santé et la sécurité des doctorantes et doctorants ?

Dans le cadre de l’enquête, la doctorante a fourni de nombreuses preuves matérielles, et informé du dépôt d’une main courante en décembre 2021. Pourtant, avant même la fin de l’audition de tou·tes les témoins, l’agresseur est autorisé à revenir sur son lieu de travail début juillet. La direction juge même bon d’informer l’agresseur de l’emploi du temps de sa victime, au motif qu’il puisse venir au musée sans risquer de la croiser.

Devant l’étudiante reçue finalement le 18 juillet, l’administration continue de se justifier avec un cynisme des plus froids ; lui exposant la « souffrance » dans laquelle se trouverait celui qui la harcèle depuis des mois, et la « violence » que sa mise à pied a représentée pour lui. Le Musée du Quai Branly choisit délibérément de privilégier le bien-être d’un agresseur sexuel au mépris de la mise en danger de ses agent·es.

Seuls le dépôt d’une plainte par la victime mi-juillet et l’interpellation de la présidence du musée – avec copie au ministère de la Culture – par le référent Violences et harcèlements sexistes et sexuels du CHSCT ministériel font finalement reculer l’administration qui rétablit la suspension du harceleur. Congés cumulés, il ne devrait pas remettre les pieds au musée avant la fin de son contrat.

Cet encouragement des violences sexistes et sexuelles et des discriminations structurelles doit cesser ! Les décisions prises par la direction du Musée du Quai Branly s’inscrivent de fait dans une domination patriarcale et une asymétrie de pouvoir entre un chercheur au statut hiérarchique dominant et privilégié, qui utilise tout son pouvoir pour harceler une doctorante à l’avenir incertain et précaire. Ce traitement laxiste d’un signalement de violences sexistes et sexuelles est aujourd’hui encore préjudiciable aux autres victimes potentielles de ce prédateur ou d’autres sévissant encore au sein du Musée du Quai Branly. En effet, comment trouver le courage de dénoncer une agression quand on sait que la direction attend plus de 6 mois, et plusieurs signalements, avant d’engager une enquête administrative ; décrédibilise la parole de la victime y opposant la « cohérence » du discours de son agresseur ; et va jusqu’à refuser d’appliquer la loi en ne signalant pas ce cas de harcèlement sexuel au procureur de la République ?

SUD Culture Solidaires et SUD Recherche EPST demandent au musée de respecter la loi ! Cela implique :

– que chaque signalement de violences et de harcèlement fasse l’objet d’une enquête administrative avec une garantie de protection de la victime et des témoins ;

– la mise en place d’un plan de prévention des violences sexistes et sexuelles, assorti de formations de prévention contre ces violences ;

– la réalisation d’une enquête auprès des agent·es du musée afin d’identifier d’autres victimes potentielles, de cet agresseur ou d’autres ;

Comme l’a fait la CGT dans sa communication adressée aux agent·es du musée, nous demandons, que le CHCST du musée, compétent en ma matière, soit pleinement informé de cette affaire et associé à toutes les démarches de prévention.Quant aux ministères de la Culture, et de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, ils doivent être exemplaires dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles et assumer leur rôle de tutelle auprès des établissement publics, comme le musée du Quai Branly et leur rôle de responsables de l’enseignement supérieur, y compris les formations doctorales. 

Des sanctions disciplinaires doivent être prises à l’encontre de l’agresseur !

L’impunité doit prendre fin !

SUD Culture Solidaires, SUD Recherche EPST, le 29 juillet 2022.