Gestion de la tempête Alex : Que s’est-il passé au CMN ?
Après le passage de la tempête Alex entre jeudi 1er et vendredi 2 octobre, toute la France a été choquée par l’ampleur des dégâts qui ont ravagé les Alpes-Maritimes, particulièrement dans les Vallées Alpines de l’arrière-pays niçois. Le bilan humain et matériel est très lourd.
L’intersyndicale CGT-CFDT-Sud Solidaires du CMN tient ici à faire part de sa solidarité et de son soutien aux populations sinistrées.
Un département sinistré par la tempête Alex
Si la violence des intempéries a été un choc pour tout le monde elle n’en était pas moins prévue depuis plusieurs jours par Météo France, les médias s’étaient même faits l’écho de la potentielle « bombe climatique » que représentait la tempête Alex.
Dès le jeudi 1er octobre, la préfecture des Alpes-Maritimes annonçait sur son site :
- Prévisions météo :
« Un épisode méditerranéen de forte intensité concernera le vendredi 2 octobre 2020 le département. Des averses orageuses se mettront en place dès le matin. Ces orages pourront être accompagnés de violentes rafales avec des phénomènes tourbillonnaires, de fortes averses et parfois de la grêle.
Les premières pluies et orages vont commencer dès vendredi matin, mais c’est en cours d’après-midi de vendredi et en soirée, que les pluies deviendront les plus fortes.
Météo France précise qu’un passage en vigilance rouge est possible en cours de journée.
Un risque de vagues-submersion est prévu également à partir de vendredi après-midi. »
- Mesures prises :
« Compte tenu de l’intensité du phénomène annoncé, le Préfet a pris la décision de fermer, ce vendredi 2 octobre 2020, l’ensemble des établissements scolaires, publics et privés du département des Alpes-Maritimes : écoles maternelles, primaires, collèges et lycées, crèches et universités.
Les sorties scolaires sont donc annulées.
Les transports scolaires sont également annulés pour toute la journée de demain.
Pour veiller à la sécurité des personnes, le préfet des Alpes-Maritimes activera le centre opérationnel départemental le vendredi 2 octobre 2020 à 7h00, chargé de coordonner les remontées d’informations des collectivités, des services météorologiques et de secours. »
Malgré toutes ces prévisions météorologiques alarmistes,malgré la connaissance par mail, dès 8h42 le vendredi 2 octobre, d’un point de situation émanant du COD (Centre Opérationnel Départemental activé par la préfecture) qui indique clairement une aggravation attendue à partir de 12h00 (Vigilance ROUGE « pluies-inondations », avec un point particulier à surveiller : le secteur de la Roya où est situé le monastère de Saorge),
L’administration locale du CMN va attendre 11h52 pour finalement demander aux agents en service de procéder à la fermeture des monuments de la circonscription des Alpes-Maritimes, à savoir : Saorge, Kérylos et Cap-Morderne (La Turbie ayant déjà été fermé dès 8h22 !), et les inviter à regagner leur domicile « en faisant preuve de la plus grande prudence ».
C’est dans ce contexte que certains de nos collègues se sont retrouvés pris au piège au moment de repartir.
Notamment une agente du monastère de Saorge, dont le retour à son domicile était devenu impossible, a été contrainte de passer la nuit dans le monument, en laissant seuls chez elle ses deux enfants adolescents, sans eau ni électricité, bloqués à l’étage de leur immeuble du fait de la montée rapide des eaux.
CELA AURAIT-IL PU ÊTRE ÉVITÉ ?
Un dialogue social sinistré par la direction de l’établissement
Le secrétaire du CHSCT Central et le secrétaire du CHSCT Grand-Sud ont saisi, le jeudi 8 octobre, la direction de l’établissement afin qu’un CHSCT exceptionnel, dédié à la tempête Alex et à ses conséquences pour les monuments et les équipes de la circonscription des Alpes-Maritimes, soit convoqué dans les meilleurs délais.
De nombreuses questions attendaient des réponses précises :
- Pourquoi l’administration a-t-elle décidé de maintenir les monuments ouverts ce matin-là, malgré les annonces par Météo France, relayées par les autorités préfectorales la veille, d’un phénomène météorologique de forte intensité? Le principe de précaution ne prévalait-il pas ?
- Pourquoi avoir attendu la toute fin de matinée pour procéder à la fermeture des monuments, malgré l’annonce des autorités préfectorales diffusée dès 7h15 prévoyant une forte dégradation de la situation à partir de midi (passage au niveau Vigilance ROUGE) ?
- Pourquoi les agents ont-ils été contactés seulement par mail pour leur demander de quitter les lieux, sans par ailleurs s’assurer de la réception effective et dans les temps du message ?
- Comment une agente a-t-elle pu se retrouver à devoir passer la nuit sur place dans le monument sans que personne ne soit au courant ?
- Pourquoi le siège a-t-il mis quasiment une semaine à réagir avant de contacter les agents du monastère de Saorge pour savoir s’ils avaient besoin d’un soutien ?
- Les procédures à mettre en place en cas de Vigilance ROUGE, qui avaient été consignées dans une note de la DRH du 5 mars 2013, ont-elles été respectées?
- Y a-t-il eu des dysfonctionnements, un manque d’anticipation et de réactivité ?
Face à la détermination des représentants du personnel à vouloir aborder le sujet à l’occasion d’un CHSCT qui lui soit exclusivement consacré, la direction de l’établissement a consenti à programmer une séance le 16 octobre.
Le moins que l’on puisse dire c’est que la gestion de cette situation et de la réunion du CHSCT fut loin d’être exemplaire.
Pas vraiment exemplaire dans l’attitude de la direction qui face à l’émotion compréhensible des agents et des représentants du personnel passa son temps à pinailler sur la chronologie des alertes préfectorales pour évacuer toute responsabilité de la part de son représentant local.
Le simple bon sens aurait dû inciter l’administrateur à fermer les sites dès le matin et à téléphoner aux agents pour leur dire de ne pas se rendre sur leur lieu de travail puisque le département passait en Vigilance ROUGE « pluies-inondations » à partir de midi.
Pas vraiment exemplaire quand la Directrice générale recadra violemment les représentants du personnel en menaçant de clôturer les débats et de lever la séance.
Pas vraiment exemplaire lorsque l’administrateur répondit à une question des représentants du personnel en se demandant s’il aurait dû aussi « envoyer des pigeons voyageurs »aux agents pour les prévenir de quitter leur monument.
Pas vraiment exemplaire enfin lorsque la Directrice générale remercia l’administrateur pour sa gestion de la situation alors que certains agents attendirent près d’une semaine avant d’être contacté par une autorité hiérarchique et que cette même autorité hiérarchique n’a pas daigné appeler les agents pour s’assurer de leur situation, considérant « qu’elle n’avait pas que ça à faire ».
Et maintenant ?
Que faut-il retenir de tout cela ?
- Tout d’abord il est indispensable qu’une procédure sur la conduite à tenir face à l’annonce d’un évènement météorologique d’intensité exceptionnelle soit rédigée avant la fin de l’année 2020, avec les représentants du personnel, membres des CHSCT.
- L’administrateur, en tant que représentant du CMN-Employeur, est le responsable de la sécurité au travail pour les monuments qu’il dirige, et il a le devoir de prendre, à ce titre, les décisions qu’imposent les circonstances, sans tergiverser. Le sort des agents, et celui des visiteurs, dans un contexte météorologique extrême, doit l’emporter sur toute autre considération. L’hésitation ici n’a pas sa place !
- Il faut intégrer dès aujourd’hui les aléas climatiques dans les DUERP car ils peuvent entraîner plus d’accidents de travail, plus de risques psychosociaux.
- Une cellule de gestion de crise doit pouvoir être mise en place au niveau du siège et de l’administration locale lorsqu’un évènement de cette ampleur a lieu afin de coordonner les actions à mettre en place avant, pendant et après une catastrophe.
PLUS JAMAIS CA !
Paris, le 23 octobre 2020