Congés, RTT, primes dans la Fonction Publique… Le gouvernement répand l’injustice

Solidaires Fonction publique

L’ordonnance sur les congés et RTT dans
la fonction publique de l’État (FPE) et dans la fonction publique
territoriale (FPT) vient de sortir le 16 avril, presque un mois après
celle relative au secteur privé (ordonnance du 25 mars). Elle vient
préciser les modalités d’application de l’article 11-I-b) de la loi
d’urgence sanitaire du 23 mars, au secteur public (hors enseignants et
versant hospitalier).

Le ministre impose :

— 5 jours de RTT, plus cinq jours de RTT ou congés annuels, aux agent·es de l’État en ASA,
— et sur décision du chef de service 5 jours aux télétravailleurs/euses,
le tout sans même une consultation préalable du comité technique, alors
que pour le privé un accord d’entreprise est nécessaire (article 11 de
la loi d’urgence sanitaire du 23 mars).

Les agent·es territoriaux peuvent se voir
appliquer les mêmes dispositifs sur décision de l’autorité territoriale
(article 7 de l’ordonnance).

Le gouvernement va une nouvelle fois encore plus loin et maltraite toujours un peu plus les fonctionnaires.

CONGÉS ET RTT : INÉGALITÉS ET DISCRIMINATIONS EN TOUT GENRE

Interpellé par Solidaires Fonction
publique sur l’hétérogénéité des mesures prises et l’inégalité de
traitement des agents qui se développait selon les secteurs
administratifs et chefs de service, le secrétaire d’État avait au départ
botté en touche en renvoyant aux décrets du 25 août 2000 et 14 juillet
2001 relatifs à la mise en oeuvre de la RTT dans la FPE et la FPT, ce
qui n’apportait rien, tout en laissant les mains libres aux chefs de
service. Il avait ajouté qu’il n’y aurait pas d’ordonnance pour le
secteur public, mais vient cependant de revirer de position. Les
dispositions de l’ordonnance du 16 avril s ’appliquent de manière
rétroactive au 16 mars. Cette rétroactivité opérée par une ordonnance
qui intervient tardivement génère une belle pagaille. Cette ordonnance
ne fait donc que rajouter au désordre, et aux inégalités de traitement.



Agents de l’État en ASA (article 1) : 10 jours de RTT/congés/CET imposés

L’article 1 de l’ordonnance 2020-430 du
16 avril prévoit que : « Les fonctionnaires et agents contractuels de
droit public de la fonction publique de l’État […] en autorisation
spéciale d’absence entre le 16 mars 2020 et le terme de l’état d’urgence
sanitaire déclaré par la loi du 23 mars 2020 ou la reprise d’activité
[…] prennent dix jours de réduction du temps de travail ou de congés annuels au cours de cette période dans les conditions suivantes :
— cinq jours de RTT pour les agent·es en ASA entre le 16 mars 2020 et le 16 avril 2020 ;
— cinq autres jours de RTT ou de congés annuels pour les agent·es en ASA entre le 17 avril 2020 et la reprise d’activité.
Lorsque les agent·es n’ont pas de jours de RTT ou pas suffisamment, les
jours sont décomptés des congés annuels, dans la limite de six jours.
Les jours de RTT peuvent être pris parmi les jours épargnés sur le
compte épargne temps (CET) de l’agent.
Les agent·es à temps partiel voient le nombre de jours de RTT et de congés imposés proratisés. »

Agent·es publics de l’État en télétravail : 5 jours de RTT/congés/CET

L’article 2 de l’ordonnance du 16 avril prévoit que : « Afin de tenir compte des nécessités de service, le chef de service peut imposer aux fonctionnaires et agents contractuels de droit public de la fonction publique de l’État […] en télétravail
ou assimilé entre le 17 avril 2020 et le terme de l’état d’urgence
sanitaire déclaré par la loi du 23 mars 2020 susvisée ou la reprise
d’activité […] de prendre cinq jours de réduction du temps de travail ou, à défaut, de congés annuels au cours de cette période. »
La possibilité d’imposer aux agent·es en télétravail cinq jours de RTT
ou de congés annuels n’est pas directement imposée dans l’ordonnance
(contrairement à l’article 1 sur
les ASA), mais revient au chef de service et doit être justifiée par les nécessités du service.
Concernant les agent·es à temps partiel, une proratisation est
effectuée. Il en est de même pour les agent·es qui ont eu des arrêts
maladie.
Lorsque les agent·es ont posé des jours de congé ou de RTT volontairement, ils sont déduits des jours imposés.
Cette ordonnance montre une nouvelle fois la volonté
gouvernementale de s’attaquer aux droits des travailleurs/euses. Après
celles et ceux du privé, c’est au tour des agent·es publics.

Cette ordonnance, c’est accroître encore les discriminations et les inégalités :

— Attaque et discrimination envers les
agent·es en ASA empêché·es pour garde d’enfants, et attaque contre les
femmes puisque ce sont majoritairement elles qui ont la charge des
enfants. Elle est bien loin l’égalité femme-homme soi-disant priorité du
quinquennat.
— Attaque contre les agent·es fragiles, toutes celles et ceux qui pour
des raisons de santé ont été mis en retrait afin d’être protégé·es et
qui se retrouvent au final sanctionné·es.
— Attaque contre les agent·es n’étant pas officiellement en télétravail,
mais travaillant quand même, agent·es voulant télétravailler, mais
n’étant pas admis·es au télétravail et placé·es de ce fait d’office en
ASA…
Et le gouvernement pousse la mesquinerie jusqu’à prévoir de véritables
calculs d’apothicaire pour les agent·es en présentiel par roulement de
deux ou trois jours, alternativement au télétravail.

DES PRIMES CHICHEMENT CALCULÉES…
ET PAS DE REVALORISATION DES  TRAITEMENTS ET CARRIÈRES

Primes pour les soignant·es : de 500 à 1500 euros

Édouard Philippe a annoncé une prime de «
1500 euros à tout le personnel qui gère la crise du Covid-19 dans les
hôpitaux des départements les plus touchés, ainsi que le personnel des
services accueillant des patients du Covid dans les départements les
moins touchés. »
Par ailleurs, l’ensemble du personnel soignant en milieu hospitalier percevra une prime de 500 euros.
Le gouvernement a annoncé également que les heures supplémentaires
effectuées au sein d’un établissement hospitalier seront revalorisées de
50 % de plus que les heures habituelles.
Primes et heures supplémentaires sont exonérées de charges fiscales et sociales.
Le gouvernement a oublié les agent·es invisibles du social et du médico-social…

Primes pour les fonctionnaires mobilisés (État et territoriale) : 1 000 euros

Cette prime exceptionnelle, également
exonérée de charges fiscales et sociales, a été annoncée par le
président de la République le 25 mars et « atteindra effectivement
jusqu’à 1 000 euros pour les agents de l’État ». S’agissant de la
fonction publique territoriale, cette prime sera versée sur décision des
collectivités locales. Actuellement, en moyenne, 15 % à 20 % des
agent·es exercent leurs missions en présentiel et 25 % à 30 % en
télétravail.

Ces primes chichement calculées
ne répondent pas aux revendications de revalorisations indiciaires des
rémunérations et carrières des agent·es publics. C’est particulièrement
vrai des filières très féminisées
de la santé du social et du
médico-social, reléguées en matière de reconnaissance pécuniaire, tandis
que leur utilité sociale longtemps ignorée, éclate enfin au grand jour.
Elles paient d’ailleurs un lourd tribut à la crise sanitaire.

Le résultat, c’est la remise en
cause des droits à congés (RTT inclus) et de la durée du travail à 35H
avec une prime pour quelques-uns pour solde de tout compte : travailler
plus pour gagner peu !

Dans la plus pure logique libérale, le
gouvernement encourage et prélève lui — même congés et RTT aux
salarié·es du privécomme du public en vue de la reprise économique après
le 11 mai : retroussez tou·tes vos manches ! Tandis que le versement de
dividendes n’est pas interdit, pas plus que les licenciements, et que
contractualisation et précarité se développent dans le secteur public
aussi. Des vacataires et contractuel·les de droit public ont été
remerciés en cette période de pandémie…

Ce gouvernement tient un discours guerrier d’union nationale pour contenir les révoltes.
Notre colère ne se confinera pas !
Nous voulons un autre avenir et nous mènerons le combat pour gagner !