PLAN DE TRANSFORMATION MINISTÉRIEL : NON AU DÉMANTÈLEMENT DU SERVICE DU LIVRE ET DE LA LECTURE!
Communiqué FSU – SUD Culture
Depuis
juin 2019, le ministère de la Culture s’est engagé dans un vaste plan
de transformation ministériel avec comme projet emblématique,
la création d’une nouvelle direction générale Transmission/Émancipation
en charge des politiques d’accès à la culture, de la coordination de
l’enseignement supérieur et de la recherche et du pilotage des
politiques territoriales du ministère.
Après 3 mois de préfiguration accélérée, la directrice de cabinet, Lucie Muniesa, a annoncé le 20 février
le rattachement du réseau des bibliothèques à la future direction générale
transmission/émancipation dans un « pôle » assurant le pilotage des
équipements culturels de proximité (micro-folies, bibliothèques,
conservatoires).
La
rumeur, qui courait depuis quelques semaines, a donc été confirmée.
Cette nouvelle direction qui devait être le chantier le plus
politique du PTM, avec l’objectif louable de donner une véritable
assise aux politiques d’accès à la culture et d’éducation artistique et
culturelle, devient aujourd’hui l’instrument du démantèlement de la
politique nationale du livre.
Cette
politique est aujourd’hui structurée au sein du ministère suivant une
logique de filière, « la chaîne du livre ». Elle réunit
lecture publique, patrimoine écrit, économie du livre et pilotage des
réseaux. Elle permet d’assurer une synthèse entre secteur public, les
bibliothèques, et secteur privé, les auteurs, les éditeurs, les
libraires. Elle intervient à l’échelle nationale comme
territoriale. Cette organisation a notamment permis la mise en place du
prix unique du livre, la création d’un droit de prêt et l’élaboration
de manifestations nationales conjointes associant toute la filière (Nuit
de la lecture, BD 2020 pour les plus récentes) ;
elle a suscité la création et le soutien de bibliothèques dans les
hôpitaux, les prisons, les comités d’entreprise, le développement des
bibliothèques départementales de prêts, la création d’un label pour
soutenir les librairies etc…
Quelles conséquences pour les DRAC ?
Cette
unité se retrouve au niveau régional, dans les DRAC avec les
conseillers livre et lecture qui travaillent en faveur de l’ensemble
de la chaîne du livre, pour le développement de la lecture, l’économie
du livre et pour la valorisation du patrimoine écrit et apportent
conseil, expertise et soutien aux auteurs, éditeurs, libraires,
bibliothécaires, médiateurs du livre, collectivités et
associations.
Quelles conséquences pour la Bibliothèque nationale de France, la Bibliothèque publique d’information et le Centre nationale
du livre ?
Cette
politique s’incarne dans 3 établissements publics placés sous tutelle
de la Direction générale des médias et des industries
culturelles : la Bibliothèque nationale de France (BnF), la
Bibliothèque publique d’information (BPI) et le Centre national du livre
(CNL), dont l’action couvre tout le territoire. Ces trois
établissements investissent plusieurs champs de la politique du livre
et de la lecture :
-le
CNL, dont la mission est de soutenir tous les acteurs de la chaîne du
livre : auteurs, éditeurs, libraires, bibliothécaires, organisateurs de
manifestations
littéraires ;
-la
BnF, qui, dans le prolongement de ses missions patrimoniales et de
démocratisation culturelle, travaille aussi avec les éditeurs pour le
dépôt
légal, les métadonnées et le livre accessible pour les personnes en
situation de handicap ;
–
la BPI qui, au-delà de son rôle de bibliothèque d’actualité, assure une
mission de coopération pour le réseau des bibliothèques publiques
françaises
pour la mutualisation des bonnes pratiques et le développement de leur
représentation internationale.
Quelles conséquences pour le réseau des bibliothèques ?
Les
bibliothèques sont également un acteur central dans l’économie du
livre : elles favorisent la diversité éditoriale, sont un acheteur de
livres
important pour le secteur et contribuent, avec le droit de prêt, à la
rémunération des auteurs.
La
perspective d’une séparation entre bibliothèques et économie du livre
nuirait à l’action de l’État, en distendant les liens entre les
différents
acteurs du secteur et en rendant difficile l’élaboration de dispositifs
innovants au bénéfice de l’ensemble de la chaîne du livre.
Cette
décision méconnaît, de plus, les missions des bibliothèques. Celles-ci
sont historiquement en charge de deux grandes missions : une mission
patrimoniale
pour la gestion des collections, une mission d’éducation et de
diffusion des savoirs et de démocratisation. Ces deux missions, exercées
dans les mêmes bâtiments, par les mêmes personnels, sur les mêmes
financements, sont indissociables.
Séparer
aujourd’hui, dans l’organisation du Ministère, la lecture publique et
le patrimoine des bibliothèques conduirait à faire
exploser l’unité d’un secteur professionnel constitutif du Ministère,
au même titre que les Musées, les Archives… Non seulement il n’y aurait
plus de politique du livre mais il n’y aurait plus non plus de politique
des bibliothèques au ministère de la Culture.
Et
bien sûr, aucune évaluation, aucune étude d’impact n’a été réalisée sur
les conséquences d’une telle décision ! Quelle sera la
plus-value pour les personnels du service du livre et de la lecture et
pour les usagers des bibliothèques ?
Comment
s’articulera le suivi des missions patrimoniales et de démocratisation
des bibliothèques territoriales ? Quelle direction
assurera la tutelle de la BNF, de la BPI et du CNL, opérateurs du
ministère qui assurent des missions transversales dans le champ de la
lecture publique, du patrimoine et de l’économie du livre ? Comment sera
réalisé le suivi RH des personnels des bibliothèques
au ministère ? Comment les conseillers livre et lecture pourront-ils
travailler avec 2 ou 3 directions différentes ?
Et les personnels du Service du livre et de la lecture, que deviendront-ils ?
Bien
évidemment, aucun d’entre eux n’a été associé, ni même informé de ce
projet qui ne tient pas compte de leur expertise, de leurs
missions et de leurs engagements au service des politiques du
ministère.
Nous
demandons l’abandon du projet de rattachement du réseau des
bibliothèques à la future direction générale transmission/émancipation
et le maintien d’une politique nationale du livre, unifiée, portée par
un service du livre et de la lecture conforté dans ses missions.
Sud Culture, SNAC-FSU, le 5 mars 2020