Censurer plus, pour gagner quoi ?

CENSURER PLUS, CRÉER MOINS ?

La prochaine exposition des Beaux-arts, organisée du 13 au 21 février
dans le cadre d’un échange avec le Royal College of Art de Londres,
était porteuse d’utopie, et son titre annonciateur de dérision :

« Week-end de sept jours »

L’École nationale supérieure des Beaux-arts soigne sa com : elle vient
de censurer l’oeuvre d’une jeune artiste, Siu Lan Ko, pourtant au coeur
du sujet de cette exposition – la presse s’en fait largement l’écho.

« Travailler moins »
« Gagner plus »

Les deux kakemono, d’une lecture à plusieurs entrées, auraient-ils été
pris au mot par la direction de l’école ? La question avait pourtant eu le
temps d’être mûrie, puisque dans un premier temps l’oeuvre avait été
sélectionnée pour être montrée, et qu’elle a ensuite été retirée inextremis.
Dans une démarche peut-être inspirée par le contexte
politique des négociations du gouvernement avec la Chine, la
distanciation humoristique a été ici ignorée – mais ce n’est pas la Chine
que visent les slogants sarkoziens détournés…

Il y a quelques années, nous nous sommes élevés contre la censure
que les chantres d’un certain puritanisme voulaient exercer sur l’art.
Aujourd’hui, nous n’admettons toujours pas que soit bafouée la liberté
créatrice.

Nous affirmions hier que les interrogations sur le corps et le désir ont
pleinement leur place dans l’art. Il n’est pas cohérent que d’autres
dimensions humaines, telles que le rapport au temps, au travail ou à
l’argent soient écartées. La mise en place de verrous sur ces thèmes
révèle une autocensure inquiétante, susceptible d’amenuiser
considérablement le champ artistique.

Le travail de l’artiste travaille notre vision du monde.
Les beaux-arts n’ont rien à gagner à censurer.