La CIP expulsée
Contre l’expulsion de la CIP du 14 rue de Charente par la Mairie de Paris, SUD culture Solidaires appelle à participer au rassemblement place de la République à 17h ce 5 novembre.
La mairie de Paris menace d’expulser la coordination des locaux du 14 quai de Charente (Paris 19).
Or ce lieu est devenu un espace crucial pour l’action, la réflexion et les fabrications mises en ouvre par celles et ceux qui l’utilisent comme point d’appui à des luttes qui s’opposent à l’individualisation libérale, à la concurrence de tous contre tous.
Dans un contexte de remise en cause générale des garanties collectives existantes, la décision d’expulser la Coordination des Intermittents et Précaires s’inscrirait clairement dans la lignée des offensives anti-sociales en cours.
S’en prendre au 14 quai de Charente, c’est attaquer une expérience de création de solidarités concrètes née d’un mouvement socio-politique, le mouvement des intermittents et précaires en 2003.*
Expulser, ce serait détruire un modèle d’action collective qui s’est construit sur le refus du rôle de simple figurant dans le « dispositif d’accompagnement social » de l’État, c’est à dire d’un système qui entretient la précarité pour mieux atomiser les individus et leurs luttes.
L’expulsion : une conception de l’aménagement urbain ?
La Mairie motive cette expulsion par l’aménagement de la ZAC Claude Bernard au cour d’un « secteur d’aménagement Paris Nord-Est » de 200 hectares. Dans les années à venir, ce « secteur Paris Nord-Est » devrait accueillir 2 lignes de tramway, une gare RER, 590 000 m2 d’activités économiques (pour 25 000 hypothétiques emplois nouveaux), 600 000 m2 de logements (15 000 habitant-e-s) et 110 000 m2 d’équipements publics.
Ce gigantesque projet urbain fait la part belle aux bureaux, logements privés et « intermédiaires » réservés aux classes moyennes et aisées. La Mairie, dont la logique d’aménagement urbain est exclusivement marchande, n’a évidemment pas prévu d’espaces pour le développement d’activités sociales autonomes, de pratiques d’éducation populaire et d’entraide. On nous signifie donc qu’il n’y aurait plus de place pour la maison des précarités que la coordination a progressivement fait vivre en ces lieux.
Un lieu unique, à préserver
Toutes les expériences, les choix de vie, les croisements, les pratiques et les rencontres permises par l’existence du 14 quai de Charente en ont fait un lieu d’auto-organisation. C’est là son originalité, son intérêt pour les individus et collectifs qui le font vivre. Des permanences de défense des droits sociaux à l’université ouverte, une cantine, une bibliothèque, nombreuses sont les activités gratuites ou à prix libre qui prennent place en ces lieux.
Voilà pourquoi nous n’acceptons pas les deux fausses propositions de « relogement » qui nous ont été faites. La première de ces fausses propositions visait à réduire l’espace social qui s’est créé à ce qu’il n’a jamais été : un simple bureau d’information, un supplétif des organismes sociaux défaillants, la seconde était soumise à la réalisation d’un contrat d’objectif incompatible avec l’autonomie de la CIP. La Ville finance des projets coûteux et élitistes tels le 104 rue d’Aubervilliers ou la future Halle Pajol. Paris a les moyens de concéder aux précaires des lieux d’organisation et d’activités.
Empêchons la mise à mort de cette expérience de mise en commun, de fabrication et de partage de ressources. Dans cette ville de riches où vivent tant de pauvres, nous avons besoin de lieux pour habiter le monde.
Pas d’expulsion sans un relogement qui permette le maintien et le développement des activités en cours.
Ici ou ailleurs, le 14 quai de Charente doit vivre !