Attention : Danger imminent menaçant les écoles d’architecture

Attention : Danger imminent menaçant les écoles d’architecture

La Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP) que le gouvernement met en place a une signification particulière au Ministère de la Culture, notamment pour les écoles d’architecture. La ministre a d’ores et déjà fixé un objectif de réduction de 20% du budget du ministère à travers une vaste opération de réorganisation et de « modernisation ». Ce qui est aujourd’hui encore un projet discuté et préparé pour l’après des élections municipales va rapidement se révéler destructeur pour la jeunesse et l’avenir de ce pays.

Il serait impensable que les organisations syndicales qui défendent les intérêts des usagers du service public et de ses personnels et la continuité de sa qualité, assistent en silence et dans l’immobilité à la mise en oeuvre d’un démantèlement programmé du Ministère de la Culture qui ouvre la voie à des privatisations déclarées ou déguisées des secteurs de l’enseignement, artistiques ou médiatiques ; impensable que les principales victimes désignées de ces politiques –les écoles d’architecture- soient détruites sans réaction de notre part. Ceci, non pas tant pour sauvegarder les acquis des agents, administratifs, enseignants et chercheurs, mais surtout pour défendre les intérêts des étudiants auxquels ce service public appartient et qu’aucun gouvernement ne pourra leur retirer sans réaction virulente.

La France compte moitié moins d’architectes que la moyenne européenne, la demande de nouveaux architectes se fait massive alors que des pans entiers de la profession partent à la retraite. Malgré cela les étudiants en architecture continuent à coûter à la communauté nationale trois fois moins qu’ils ne coûtent en moyenne européenne. Ces étudiants qui constituent 60% du ministère de la culture ne lui coûtent que 30% des subventions.

La réforme du LMD a été menée de façon superficielle, en malmenant dans les faits le statut du diplôme professionnalisant ; elle montre l’improvisation de l’administration et son incapacité à saisir les impératifs pédagogiques, en se contentant d’afficher des pseudo-réussites alors que le terme clé de la réforme, le doctorat, ne voit aucun moyen nouveau mis en place. Cet amateurisme politique entraîne le retard de la mise en réseau des écoles et de leurs centres de recherche ; la mise en place du doctorat tarde énormément faute de mise en œuvre du statut d’enseignant-chercheur, du développement d’une recherche originale, de liens sérieux avec les écoles doctorales. La HMONP a été mise en place sans moyens, sans garde-fous vis–à–vis de la profession. En effet, la prise en charge financière des stagiaires diplômés ne doit-elle pas être reconsidérée d’urgence ?

Alors que la ministre de l’éducation nationale annonce l’augmentation tangible des budgets pour former les étudiants de l’université, aucune voix ne s’élève pour que soient augmentés les budgets permettant la formation des étudiants en architecture.

Briser la continuité du service public n’est ni une modernisation ni un gain de performance mais un gaspillage

La politique de démantèlement du service public de l’enseignement de l’architecture est incohérente. Depuis l’adoption de la réforme LMD nous avons toujours répété que cet alignement sur les standards européens nécessitait une intervention accrue de l’Etat et un renforcement des structures de l’enseignement en lui accordant plus de moyens, en facilitant la constitution d’équipes enseignantes stabilisées et efficaces, en mettant l’accent sur les nouveaux efforts d’innovation et de création nécessaires.

Or, la politique actuelle efface les écoles d’architecture des priorités du ministère, la lettre de mission de la ministre d’août 2007 les ignore : elle ne les cite pas. Cette politique ne permet pas aux organisations du personnel de participer aux discussions sur le changement des statuts des établissements, elle ne répond pas aux demandes d’accroissement des moyens pour mettre en œuvre les réformes pédagogiques, mais elle comporte implicitement une décision de réduire le rôle de la culture dans la société bien loin des rodomontades présidentielles sur la politique de civilisation. Est-il étonnant que l’enseignement de l’architecture soit minoré ? Est-il étonnant que la politique culturelle telle que la conçoivent nos dirigeants aboutisse au démantèlement du Ministère de la Culture ? Si les écoles d’archi n’ont plus leur place dans la culture, où doivent-elles s’ancrer ? La question mérite d’être posée et largement débattue.

Les écoles d’architecture ont toujours été les mal-aimées de ce ministère, en effet depuis leur rattachement aucun effort sérieux pour les développer n’a été entrepris : ce n’est pas un bâtiment neuf par décade qu’il faut mais dix, ce n’est pas une politique de l’image à travers un monument unique par décade qui répondra aux besoins des écoles de se développer et de se moderniser spatialement. De plus, les écoles d’architecture arrivent à un moment crucial de leur histoire : celui du départ à la retraite de la moitié de leurs enseignants dans les quelques années à venir. Cette conjonction de la politique ministérielle actuelle et de l’évolution propre aux écoles d’architecture risque fort de générer une crise grave qui aboutirait à leur démantèlement pour les besoins d’une pseudo rationalisation. Or, celle-ci ne sert qu’à masquer un désengagement total, une contradiction de fait avec les réformes exigées précédemment et un abandon du service public.

Non au modèle post-soviétique de privatisation des services publics de l’enseignement et de la recherche en architecture

La privatisation de nombre des services qui dépendaient du ministère ainsi que la politique générale du gouvernement au niveau de l’enseignement supérieur ne copient pas seulement un quelconque modèle anglo-saxon basé sur la constitution de contre-pouvoirs s’équilibrant dynamiquement. Elles créent des pouvoirs locaux non-encadrés. La façon de conduire les réformes actuelles ne peut que déboucher sur des appropriations par des groupes qui profiteraient ainsi de la privatisation de fait des pans entiers de la culture. A travers le renforcement autoritaire du rôle des directeurs et la réduction du dialogue entre les acteurs concernés, c’est le modèle post-soviétique que l’on nous prépare, un modèle où règneront des autocrates qui marginaliseront toute contestation, critique ou innovation. Un modèle où la précarité des statuts des personnels va être accrue et le contrôle sur la qualité des enseignements relâché au profit de gestions non-régulées. La culture peut-elle être réduite au statut de marchandise et les écoles d’architecture au rang de prises de guerre de groupes aux intérêts contraires ou divergents de celui des étudiants ?

Ces fausses réformes pour un vrai démantèlement préparées sans transparence et sans discussion ouverte, ces réformes dont l’objectif n’est qu’un rabais comptable, vont appauvrir la richesse nationale et aboutir à des pertes massives de capital foncier, humain ou symbolique. Alors que le gouvernement veut changer de méthodes de calcul de la richesse nationale, nous disons haut et fort que la culture est une richesse qui ne se mesure pas qu’en termes financiers. Nous disons haut et fort que ce n’est pas dans les écoles d’architectures que l’on peut faire les 20% d’économies exigées par la ministre en décembre.

SNE-SUP-FSU et SUD-Culture Solidaires dénoncent les politiques actuellement mises en place qui visent à assassiner le service public de l’enseignement de l’architecture et appellent à la plus vaste mobilisation des personnels, administratifs et enseignants, qui vont être plongés dans la précarité ainsi que qu’à la mobilisation des étudiants dont l’avenir sera fermé par des formations au rabais.

NON à la révision des politiques publiques que l’on nous prépare, OUI à l’unité syndicale pour imposer un dialogue social et sauver le service public.

Avec l’ensemble du mouvement syndical

Demandons la création d’une Direction de l’Enseignement et de la Recherche au sein du Ministère et signons la pétition de l’intersyndicale sur la RGPP massivement

Exigeons la stabilisation des institutions, des personnels et des programmes pédagogiques pour assurer la continuité du service public

Expliquons la nécessité de la création massive de postes et leur définition impliquant l’ouverture de l’enseignement sur la recherche et le renforcement de la professionnalisation des diplômes et non pas leur affaiblissement et leur banalisation

Défendons une conception de l’architecte comme homme de culture et de l’architecture comme acte de création culturelle et de renforcement du lien social et citoyen et dans la maîtrise de la qualité de l’environnement

Affirmons notre conception de l’architecture non pas comme vecteur de spéculation foncière (on a vu ce qu’il en est aux USA) mais porteur d’une modernité architecturale soucieuse de la qualité et de la durabilité des interventions et de la création de cadres de vie humanisés

Offrons toute l’information nécessaire aux étudiants pour qu’ils occupent une position centrale dans la définition de leur avenir et pour qu’ils se mobilisent de façon unitaire avec les personnels